Animaux en EHPAD : règles et bienfaits pour les résidents

Publié le 29/05/2024

Avec plus de la moitié des ménages en France accueillant un ou plusieurs animaux de compagnie, ceux-ci occupent une place centrale au sein des foyers. Les séniors ne font pas exception, puisque plus d’un tiers d'entre eux possèdent également un animal (Insee). Le rapport affectif que nous établissons avec les animaux est très fort et participe incontestablement à notre équilibre physiologique et émotionnel. Cet équilibre devient d’autant plus fragile à mesure que nous avançons en âge. Ainsi, la question de pouvoir accueillir les animaux en maison de retraite et en E.H.P.A.D. est devenue un véritable sujet de société. Quel est le contexte réglementaire ? Quels sont les bienfaits pour les résidents en E.H.P.A.D. ? Tour d’horizon et revue de la littérature.



E.H.P.A.D. en France, un lieu de vie dans lequel les animaux ont leur rôle à jouer

 
Un E.H.P.A.D. se doit d'être considéré comme un lieu de vie, un endroit où les résidents doivent pouvoir se sentir connectés à leur histoire personnelle. Que ce soit pour choisir ses meubles, accrocher ses décorations, ou bien évidemment accueillir son animal, la personnalisation des espaces privatifs est fondamentale pour le bien-être des personnes âgées. L'ensemble de ces facteurs s'inscrit dans une approche du « comme à la maison » étudiée par plusieurs études internationales qui en montrent les bénéfices et indiquent qu’il est nécessaire de rompre avec des pratiques hospitalières ou hôtelières qui dépersonnalisent l'environnement (Charras, 2017).

Les animaux de compagnie en E.H.P.A.D. jouent un rôle majeur dans cette appropriation et humanisation. Ils ne sont pas seulement des compagnons de vie, mais aussi des liens tangibles avec la vie que les résidents menaient avant leur déménagement. Les animaux aident à préserver un sentiment de continuité et de stabilité, essentiel pour le bien-être psychologique des résidents. En effet, plusieurs recherches ont démontré que les interactions avec les animaux peuvent réduire le stress, l'anxiété et les sentiments de solitude, tout en améliorant l'humeur générale et la qualité de vie (Nordgren, 2012).

En outre, la présence d'animaux dans les E.H.P.A.D. favorise également les interactions sociales, tant entre les résidents eux-mêmes qu'avec le personnel soignant et les visiteurs. Les animaux servent de médiateurs et facilitent les échanges, créant ainsi un environnement plus convivial et chaleureux. Ils deviennent de véritables piliers affectifs qui soutiennent l'équilibre émotionnel des aînés, contribuant à leur épanouissement et à leur santé globale.

Ainsi, intégrer des animaux dans les E.H.P.A.D. ne relève pas seulement du bien-être individuel mais participe à la création d'un environnement de vie enrichi et stimulant, où chaque résident peut se sentir valorisé et connecté, autant à son passé qu'à sa nouvelle communauté.


Le droit évolue en faveur de l’intégration des animaux en E.H.PA.D.


Avant 2024, la législation ne statuait pas sur le sujet de l’accueil des animaux en E.H.P.A.D. et la décision d’accepter les animaux était laissée à la libre appréciation de chaque établissement. Mais depuis le 8 avril 2024, les textes officiels relatifs aux « mesures pour bâtir la société du bien vieillir et de l'autonomie » ont été promulgués (Journal officiel du 9 avril 2024).
Cette loi adopte plusieurs mesures pour prévenir la perte d'autonomie et lutter contre l'isolement des personnes âgées.

Elle contient un amendement du député LR Philippe Juvin concernant l’accueil des animaux de compagnie des résidents en E.H.P.A.D.. La loi « Bien vieillir » prévoit de permettre aux résidents en E.H.P.A.D. d’accueillir leurs animaux de compagnie. Cette autorisation, selon le site du service public, se fera sous réserve de pouvoir « assurer les besoins » de ces animaux et de « respecter les conditions d’hygiène et de sécurité ». (Legifrance)

Cette avancée du droit est une nouvelle particulièrement positive pour nos aînés car bon nombre d’E.H.P.A.D. en France, pour éviter les problématiques organisationnelles et sanitaires, refusaient purement et simplement les animaux. Par conséquent, en sus de l’épreuve d’intégrer un E.H.P.A.D. et de laisser derrière soi son domicile et ses souvenirs, les résidents étaient dans l’obligation de devoir se séparer de leurs animaux, avec le déchirement émotionnel induit. Une double peine en quelque sorte. 

Selon une interview de Christophe Amarantinis, président du Synerpa (Syndicat national des établissements et résidences pour personnes âgées) il s’agit d’une très bonne nouvelle et « une mesure extrêmement importante qui permet aux résidents de ne pas être isolés et d'avoir une continuité par rapport à ce qu'ils avaient dans leur ancienne vie, ça évite la rupture entre le domicile et l'établissement » (France Info).

Le président souligne également que l’animal joue un rôle bénéfique dans la socialisation et l’intégration des nouveaux résidents car à leur arrivée les personnes âgées ne connaissent pas encore les autres résidents et elles ont tendance à être en retrait. C’est la raison pour laquelle être avec son animal, rassure, favorise les interactions sociales avec le personnel et les autres résidents. La présence de ce compagnon suscite spontanément des conversations. Les personnes entament le dialogue, caressent les animaux, posent des questions, créent des liens.


Le niveau d’autonomie : un facteur déterminant pour la prise en charge des animaux en E.H.P.A.D.


Au-delà du contexte réglementaire que nous venons d’évoquer, il semble également important de prendre en considération le niveau d’autonomie des résidents afin qu’ils puissent s’occuper de leurs animaux dans de bonnes conditions. Les résidents présentant un degré d’autonomie satisfaisant sont généralement capables de nourrir leurs animaux, de les promener, de s’occuper du toilettage etc.. Des moments qui, par ailleurs, contribuent à leur propre activité physique mais aussi à  leur et bien-être général (Friedmann & Son, 2009). En revanche, pour ceux dont l’autonomie est réduite, ces tâches peuvent parfois devenir une contrainte, nécessitant une aide substantielle.

En effet, certaines personnes âgées ayant des limitations fonctionnelles peuvent éprouver des difficultés à prendre soin de leurs animaux, ce qui peut entraîner des situations de stress et de frustration (McNicholas & Collis, 2000). Les E.H.P.A.D. devraient donc mettre en place des stratégies de soutien adaptées avec l’aide du personnel soignant, l’intervention de bénévoles ou l'utilisation de services spécialisés dans la prise en charge des animaux. A ce sujet, une autre équipe de recherche souligne l'importance des « programmes d'intervention animale assistée » dans les environnements de soins de longue durée, qui peuvent offrir un soutien précieux aux résidents. (Johnson et al, 2002)

La question au cœur du débat est donc d’évaluer dans quelle mesure le personnel ou les autres pensionnaires peuvent-ils, ou doivent-ils, prendre le relais pour s’occuper d’un animal ? Cette question est loin d’être tranchée et il semblerait qu’il faille étudier les situations au cas par cas pour estimer au mieux le rapport bénéfices/contraintes. Cela peut dépendre en toute logique du nombre total d’animaux présents dans un lieu, des frais connexes et de la motivation de la communauté à nourrir les animaux.

Mais il conviendra aussi de déterminer le niveau d’autonomie de chaque résident et d’adapter les solutions en fonction de leurs besoins spécifiques pour garantir que la présence d’animaux en E.H.P.A.D. reste une source de bien-être plutôt qu’une source de stress supplémentaire.


Les bienfaits des animaux en E.H.P.A.D. mis en évidence par les recherches scientifiques


L’intégration des animaux, principalement chiens ou chats, présente de nombreux avantages démontrés par la recherche scientifique. Ces bienfaits justifient le fait d’accepter les personnes âgées avec leurs animaux ou pour le moins la mise en place de programmes d'interaction avec les animaux dans les établissements pour personnes âgées, comme moyen de promouvoir un environnement plus sain et plus heureux pour les résidents. 

Sans prétendre à l’exhaustivité – car les études à ce sujet sont très nombreuses - nous proposons de faire le point sur 5 problématiques auxquelles font face les personnes âgées et d’analyser l’impact que peuvent avoir les animaux dans leur résolution : 

  1. Amélioration de la santé mentale
  2. Réduction du stress et de l'anxiété
  3. Augmentation de l'activité physique
  4. Renforcement des liens sociaux
  5. Perception positive du lieu de vie


Amélioration de la santé mentale

Compte-tenu de l'incidence élevée de dépression et d'anxiété des personnes âgées, la santé mentale des résidents en E.H.P.A.D. est une préoccupation majeure. Une étude publiée dans le Journal of Psychosocial Nursing and Mental Health Services a révélé que la médiation animale (la présence d'un chien) peut significativement réduire les symptômes de dépression et d'anxiété chez les résidents (Banks & Banks, 2002). Les interactions régulières avec les chiens, telles que les caresses et les jeux, favorisent la libération d'endorphines, des hormones du bien-être, qui contribuent à une meilleure humeur et à une diminution de l'anxiété.


Réduction du stress et de l'anxiété

Le stress et l'anxiété sont des états fréquents chez les personnes âgées, particulièrement celles atteintes de démence. Une recherche publiée dans le American Journal of Alzheimer's Disease and Other Dementias  souligne elle aussi les bienfaits de la  médiation animale en montrant que les interactions avec des chiens peuvent réduire les niveaux de stress et d'agitation chez ces patients (Nordgren & Engström, 2014). La présence d'un chien offre ainsi une source de confort émotionnel, crée un environnement plus apaisant et peut distraire les résidents des pensées stressantes.


Augmentation de l'activité physique

L'activité physique est essentielle pour maintenir la santé physique et cognitive des personnes âgées. Une étude publiée dans le Journal of the American Medical Directors Association a révélé que la présence de chiens encourageait les résidents à participer à des activités physiques, telles que la marche et les jeux (Friedmann, Thomas, & Eddy, 2000). Ces activités améliorent non seulement la condition physique des résidents mais leur offrent aussi des opportunités de socialisation, ce qui est décisif pour leur bien-être général.


Renforcement des liens sociaux 

Les animaux de compagnie, en particulier les chiens, facilitent les interactions sociales. Nous avions souligné ce point un peu plus haut, en évoquant les récentes dispositions réglementaires d’avril 2024. Une étude présentée dans la revue Anthrozoös a aussi montré que les chiens favorisent les interactions entre résidents, personnel et visiteurs (Wood, Giles-Corti, Bulsara, & Bosch, 2007). La présence d'un chien peut servir comme point de discussion et de connexion, aider à briser la glace et à encourager des conversations, provoquer des interactions positives.


Perception positive du lieu de vie

Les résidents des E.H.P.A.D. qui possèdent des animaux de compagnie ont généralement une meilleure qualité de vie. Une étude publiée dans le Journal of Gerontological Nursing a démontré que les résidents en présence d'animaux ont une satisfaction accrue de leur environnement de vie (Bernstein, Friedmann, & Malaspina, 2000). Les chiens apportent une source constante de compagnie et d'affection, ce qui peut atténuer le sentiment de solitude et d'isolement souvent ressentis par les séniors dans les E.H.P.A.D.
 
Pour connaitre les maisons de retraite ou E.H.P.A.D. susceptibles d’accueillir vos animaux dans les meilleures conditions contactez un de nos conseillers.

Consulter aussi notre article sur la Zoothérapie en E.H.P.A.D.


Sources


Insee  &  Observatoire des seniors - https://observatoire-des-seniors.com/en-europe-pres-dun-senior-sur-deux-possede-un-animal-de-compagnie/

Charras, K., & Cérèse, F. (2017). Être «chez-soi» en E.H.P.A.D.: domestiquer l’institution. Gérontologie et société, 39(1), 169-183.

Nordgren, L., & Engström, G. (2012). Effects of animal-assisted therapy on behavioral and/or psychological symptoms in dementia: A case report. American Journal of Alzheimer's Disease & Other Dementias®, 27(8), 625-632.

Légifrance - LOI n° 2024-317 du 8 avril 2024 portant mesures pour bâtir la société du bien vieillir et de l'autonomie – Article 26
https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000049385823

France Info - https://www.francetvinfo.fr/sante/senior/maltraitance-dans-les-ehpad/animaux-autorises-dans-les-ehpad-c-est-une-mesure-extremement-importante-souligne-le-president-du-syndicat-national-des-etablissements-et-residences-pour-personnes-agees_6397918.html

Friedmann, E., & Son, H. (2009). The human–companion animal bond: how humans benefit. Veterinary Clinics of North America: Small Animal Practice, 39(2), 293-326.

McNicholas, J., & Collis, G. M. (2000). Dogs as catalysts for social interactions: Robustness of the effect. British journal of psychology, 91(1), 61-70.

Johnson, R. A. (2008). Animal-assisted activity among patients with cancer: Effects on mood, fatigue, self-perceived health, and sense of coherence. Number 2/March 2008, 35(2), 225-232.

Banks, M. R., & Banks, W. A. (2002). The effects of animal-assisted therapy on loneliness in an elderly population in long-term care facilities. The journals of gerontology series A: biological sciences and medical sciences, 57(7), M428-M432.

Friedmann, E., Thomas, S. A., & Eddy, T. J. (2000). Companion animals and human health: Physical and cardiovascular influences. Companion animals and us: Exploring the relationships between people and pets, 125-142.

Bulsara, M., Wood, L., Giles-Corti, B., & Bosch, D. (2007). More than a furry companion: The ripple effect of companion animals on neighborhood interactions and sense of community. Society & Animals, 15(1), 43-56.